Mes 3 interventions au cours des séances des 26 et 27 janvier 2023 au Grand Conseil sur le congé parental, la lutte contre le VIH et l'augmentation des subsides assurance-maladie.
Une initiative trompeuse (rapporteur de minorité)
Mesdames les députées, Messieurs les députés,
Les Vertes et les Verts sont favorables à toute initiative visant à améliorer les conditions qui prévalent actuellement au niveau des congés maternité et paternité à condition toutefois que ladite initiative tienne la route et qu’elle soit ambitieuse. Or, tel n’est pas le cas de l’initiative 184 (1) pour 4 raisons.
La première tient au fait que l’initiative est une attaque contre le congé maternité. En effet, l’alinéa 3 de l’article 205 de la Constitution tel que rédigé dans l’initiative 184 ouvre la possibilité à une diminution du congé maternité de 16 à 14 semaines en cas d’accord entre les deux parents, ce qui n’est pas acceptable pour les Vertes et les Verts. Les femmes ont droit à un congé maternité de 16 semaines à Genève, pas question de revenir en arrière.
L’initiative 184 est d’ordre constitutionnel et, à ce titre, elle devra recevoir l’aval de l’Assemblée fédérale en cas d’acceptation par le peuple. En admettant que tel soit le cas, il faudrait ensuite la traduire par une loi d’application dans laquelle il devrait être précisé, pour éviter tout risque de diminution, que le congé maternité est de 18 semaines, évitant ainsi d’aller en-dessous des 16 semaines en cas d’accord sur les deux semaines entre les parents.
Les Vertes et les Verts auraient souhaité que cette question soit d’ores et déjà réglée dans le cadre d’un contre-projet.
La deuxième raison concerne les nombreuses insécurités juridiques parmi lesquelles on peut relever le risque qu’un congé parental cantonal empiète sur les compétences du législateur fédéral en matière de droit civil ou encore que ce congé parental ne s’adresse pas à tout le monde en fonction que l’on soit employé, au bénéfice d’un contrat de droit public ou privé ou indépendant.
Concernant ces derniers, l’article 205, alinéa 3 ne les mentionne pas. Il faudrait donc, si l’initiative devait être acceptée, les faire figurer dans la loi d’application étant donné que les indépendants participent au financement pour la part équivalente à celle du salarié.
Les Vertes et les Verts auraient souhaité que cette question des indépendants soit d’ores et déjà réglée dans le cadre d’un contre-projet.
La troisième raison est au cœur même de l’initiative qui trompe son monde puisque le congé parental proposé dans le texte est soumis à la bonne volonté de l’employeur !
En effet, l’initiative vise à financer un congé parental, mais en aucun cas à le rendre obligatoire ! Rappelons que le financement ne peut pas se faire au moyen des allocations pour perte de gain, le droit fédéral actuel ne l’autorisant pas.
Pour contourner cet écueil, les initiants ont prévu une assurance financée à parts égales entre employeurs et employés. Mais la marge de manœuvre juridique étant insuffisante pour rendre obligatoire ce congé, un recours au Tribunal fédéral étant quasi assuré, l’initiative laisse à la libre appréciation de l’employeur de l’accorder complètement, partiellement ou pas du tout !
Cela revient par conséquent à cotiser sans aucune garantie de pouvoir bénéficier de la prestation !
En définitive, avec son titre racoleur, l’initiative 184 laisse à penser qu’elle représente une réelle avancée en matière de congé parental.
Mais il n’en est rien !
En effet, si l’on additionne les 16 semaines de congé maternité aux 2 semaines de congé paternité déjà existant, l’initiative ne propose que 6 semaines supplémentaires.
Et encore puisqu’il n’y aura pas d’obligation de les accorder !
Pour les Vertes et les Verts, concilier au mieux vie professionnelle et privée, tendre à une meilleure répartition des tâches entre les parents et donner à l’enfant une opportunité plus large de profiter de ses deux parents demandent du temps. Le projet de loi 12595 déposé au mois d’octobre 2019 par l’ancienne députée verte Delphine Klopfenstein Broggini va dans ce sens. Il propose en effet de doter Genève d’un congé paternité de 18 semaines ainsi que de faire passer le congé maternité de 16 à 18 semaines, soit 36 semaines en tout contre seulement 24 à l’initiative 184. Une durée de 36 semaines est bien plus en adéquation avec les objectifs cités plus haut de conciliation de vie professionnelle, de répartition des tâches et de bien-être de l’enfant.
Les Vertes et les Verts auraient souhaité que ce projet de loi soit discuté dans le cadre d’un contre-projet à l’initiative 184.
En conclusion, l’initiative 184 a de nombreux défauts, le principal étant que ce congé parental est très modeste dans sa durée, soit seulement 6 semaines qui plus est facultatives !
Les Vertes et les Verts ne peuvent dès lors pas la soutenir.
Mais malgré les nombreuses insécurités juridiques que comportent cette initiative, et qui ne pourront être levées que dans un second temps et sans doute dans plusieurs années si elle est acceptée par le peuple, les Vertes et les Verts regrettent que la majorité aient refusé d’entrer en matière sur un contre-projet qui, tout en n’effaçant pas ces insécurités juridiques, aurait eu l’avantage de présenter en votation au peuple un projet bien plus abouti que l’initiative 184.
En effet, dans le cadre de ce contre-projet, les questions concernant le nombre plancher de semaines du congé maternité, l’inclusion des indépendants, l’obligation d’accorder ce congé, son mode de financement ou encore le nombre de semaines pour ce congé parental auraient pu être approfondies.
La majorité ne l’a, hélas, pas souhaité, c’est une occasion manquée car une initiative qui a contre elle la CGAS, l’UAPG et les partis de gauche a bien peu de chance de l’emporter devant le peuple, comme un commissaire PLR l’a d’ailleurs relevé.
A se demander si, finalement, faire échouer cette initiative et ainsi repousser aux calendes grecques la discussion sur le congé parental n’est pas l’objectif de l’UDC, du PLR, du PDC et du MCG.
P.S. L’initiative a été accepté par le PDC, le PLR, l’UDC et le MCG et refusée par EAG, les Vert-e-s et le PS. Le principe d’un contre-projet a été refusé selon la logique inverse.
Une réponse du Conseil d’Etat insatisfaisante
Mesdames les députées, Messieurs les députés,
J’avais souligné lors de la première réponse du Conseil d’Etat à la motion 2585 que cette dernière était bien documentée, mais ne répondait que partiellement aux invites. J’avais également mis en avant que garantir l'accès économique, mais aussi social et logistique aux populations les plus à risque et soutenir les interventions déjà existantes auprès des populations les plus vulnérables, c’était bien.
Mais que ce n’était pas suffisant, car si l'incidence du VIH avait diminué à Genève ces dernières années, elle semblait avoir atteint un seuil et peinait à descendre sous la barre des 50 nouveaux cas par an.
C’est la raison pour laquelle les Vertes et les Verts demandaient un effort supplémentaire de la part du Conseil d’Etat pour se rapprocher de l’objectif 0 infection demandé par la motion et attendaient donc du Département qu’il revienne devant notre parlement avec des propositions qui allaient dans ce sens après lui avoir renvoyé sa réponse.
Or, la deuxième réponse du Conseil d’Etat commence par dire que ce dernier ne revoit pas sa position (1). Elle se contente, certes de manière très complète, de faire un état des lieux de ce qui se fait, mais sans aucune nouvelle proposition.
Bref, cette réponse, qui est un copié-collé étendu de la réponse précédente, ne saurait satisfaire les Vertes et les Verts qui demandent une nouvelle fois son renvoi au Conseil d’Etat en espérant qu’avec la nouvelle législature des propositions concrètes, notamment celle sur un élargissement de l’accessibilité à la prophylaxie pré-exposition en la rendant gratuite en tout cas pour les jeunes, seront faites pour encore améliorer la lutte contre le VIH et les infections sexuellement transmissibles.
P.S. Le renvoi en commission a été accepté par 47 OUI, 20 NON et 1 abstention
Augmentation des subsides d’assurance-maladie (rapporteur de majorité)
Mesdames les députées, Messieurs les députés,
Rappelons tout d’abord que ce projet de loi s’inscrit dans un catalogue de mesures prises par le Conseil d’Etat. Trois mesures sur les quatre concernent des modifications règlementaires, de sorte qu’il n’a pas été nécessaire de passer devant notre Parlement.
Il s’agit de :
1° L’indexation de 3,7% au 1er janvier 2023 des allocations naissance/accueil, des allocations pour enfants et des allocations de formation pour un montant de 30 millions qui est financé par le fonds de compensation des allocations familiales ;
2° L’adaptation du forfait d’entretien pour l’aide sociale dont le montant est passé de 986 francs à 1006 francs depuis le 1er janvier 2023. L’augmentation de 3, 8 millions est intégrée dans le budget du canton voté le 16 décembre.
3° La modification règlementaire, valable uniquement pour l’année 2023, concernant l’allocation de logement et consistant à faire passer le financement maximum par pièce de 1000 CHF par an à 1400 francs à partir du 1er avril 2023 pour un coût estimé de 6 millions et également couvert par le budget.
La seule mesure qui nécessite un changement de la loi est celle relative aux subsides d’assurance-maladie, d’où le dépôt du projet de loi 13209 par le Conseil d’Etat.
Ce projet de loi (1) a pour but d'augmenter le montant destiné à la réduction des primes de certaines assurées genevoises et de certains assurés genevois en tant que mesure de soutien destinée à protéger leur pouvoir d'achat dans un contexte de fort renchérissement. A cet égard, pour l'année 2023, l'augmentation moyenne des primes à Genève s'élève à 4,7% par rapport à l'année 2022.
L’augmentation des montants des subsides d'assurance-maladie, pour un total de 26 millions de francs qui sont inscrits dans le budget voté le 16 décembre 2022, est prévue pour l'année 2023 uniquement. Il s’agit donc d’une dérogation aux montants normalement applicables figurant à l'article 22 LaLAMal.
Les personnes du groupe 9 ne sont pas concernées par ces augmentations qui visent à apporter une aide ciblée à la classe moyenne inférieure. L’adaptation du montant des subsides proposée par ce projet de loi concerne 137 000 personnes. Les bénéficiaires de prestations complémentaires à l'AVS/AI et pour familles, ainsi que les personnes au bénéfice de prestations financières de l'aide sociale ne sont pas mentionnées dans le présent projet de loi puisque ces personnes sont soumises à une autre législation.
Si l’ensemble de la commission partage le constat que l’augmentation des assurances maladie met, une fois encore, à rude épreuve le porte-monnaie de la population genevoise, les avis divergent sur la manière de lui venir en aide.
Pour la majorité, une augmentation des subsides de 20 et 10 francs pour les adultes des groupes de revenu 1 à 8, de 15 francs pour les jeunes adultes et de 10 francs pour les enfants correspond à l’augmentation moyenne de la prime genevoise pour 2023.
Elle n’a donc rien d’un « arrosage », puisqu’elle ne fait que mettre à niveau des subsides qui sont d’ores et déjà progressifs depuis leur introduction en 2020. Dans le contexte inflationniste que nous connaissons, pouvoir bénéficier d’un subside de 720 francs supplémentaires pour une famille avec deux adultes et deux enfants n’a donc rien d’anecdotique.
C’est la raison pour laquelle, Mesdames les députées, Messieurs les députés, la majorité de la commission vous invite à soutenir ce projet de loi.
P.S. Le projet de loi a été accepté par 61 OUI (EAG, PS, Vert-e-s, PDC, MCG) et 28 NON (UDC, PLR)