4 étoiles. « Quand vient l’automne ». Michelle vit une retraire paisible dans une jolie maison de campagne située dans un petit village de Bourgogne. Sa meilleure amie, Marie-Claude, vit non loin d’elle. A la Toussaint, sa fille Valérie, avec laquelle elle entretient des relations tendues, vient lui rendre visite et déposer son fils Lucas pour qu’il passe la semaine de vacances avec sa grand-mère qu’il adore. Mais le repas familial va déclencher des événements en cascade après que Valérie ait été empoisonnée par des champignons cueillis par sa mère…
Comédie dramatique avec une intrigue policière secondaire mais qui en dit long sur les relations entre les personnages, « Quand vient l’automne » est avant tout un film qui, à l’image de son titre, se penche sur le passé qui peut resurgir n’importe quand et avoir des conséquences imprévisibles sur le présent et l’avenir. Magnifiquement photographié et mis en scène, le long-métrage manie avec sensibilité l’humour noir, l’ambiguïté ou encore l’amoralité. Porté par Hélène Vincent et Josiane Balasko qui font preuve d’une grande subtilité dans leur jeu, le film ravira celles et ceux qui aiment les histoires qui sèment le doute dans les esprits, tel un poison.
3 étoiles : « Joker : Folie à Deux ». Arrêté et interné dans une prison pour délinquants avec des problèmes psychiatriques après avoir commis cinq crimes sous les traits du Joker, Arthur Fleck est en attente de son procès. A quelques jours de celui-ci, il fait la connaissance de Harley Quinn dont il tombe follement amoureux. Partageant le même délire, d’où le titre du film « La Folie à Deux », ils vont s’échapper dans un monde parallèle, jusqu’à ce que la réalité les rattrape. Ou pas.
Après l’énorme succès critique et public de « Joker » en 2019, cette suite, qui en est véritablement une puisqu’elle commence là où se terminait la première partie, était très attendue. Trop sans doute. Certes, le film n’est pas mauvais. Mais cette « Folie à Deux » ne décolle malheureusement jamais vraiment. La faute à des chansons, exceptées celles qui sont mises en scène façon music-hall et qui sont un plus pour l’intrigue, qui étirent inutilement un scénario qui aurait de toute façon mérité d’être resserré, mieux ciblé et faire preuve de plus de …folie. Le film garde toutefois un attrait certain grâce à la performance de Joachin Phoenix qui est toujours aussi génialement fou, une mise en scène au cordeau et une photographie, une lumière ainsi que des décors qui vous attirent malgré tout dans le monde barré du Joker.
Toujours à l’affiche
5 étoiles. « Les Graines du figuier sauvage ». Pour Iman, sa promotion en tant que juge d’instruction au tribunal révolutionnaire de Téhéran est l’aboutissement de 20 ans de carrière au service du régime. Il va enfin pouvoir améliorer le train de vie de sa femme et de ses deux filles, l’une adolescente, l’autre majeure. Mais à peine nommé, un immense mouvement de protestation secoue le pays. Dépassé par l’ampleur des événements, la justice devient expéditive au grand damne d’Iman qui décide malgré tout de s’y conformer. Chez lui, la révolution gronde également rendant Iman de plus en plus méfiant à l’égard de sa femme et de ses filles.
Prix spécial du Jura au Festival de Cannes 2024, « Les Graines du figuier sauvage » mérite amplement cette récompense. Le film transpose de manière brillante, avec un seul (petit) bémol sur sa longueur (2h45), les affres du régime iranien au sein d’une famille confrontée à un mari et à un père qui se sentant menacé va reproduire auprès des siens les méthodes utilisées par la dictature auquel il s’est soumis. Film hautement politique, incrusté de courtes séquences tournées avec des portables au moment des manifestations du mouvement « Femme, vie, liberté » à l’automne 2022, « Les Graines du figuier sauvage » entraîne l’audience dans une spirale infernale avec une dernière heure où la tension est à son comble grâce à une mise en scène formidablement anxiogène et une distribution parfaite.
4 étoiles. « Speak No Evil ». Les familles Dalton et Field se rencontrent en vacances en Italie. Les premiers ont une fille de 12 ans et les seconds un fils du même âge qui ne peut pas parler en raison d’une langue atrophiée. Bien que les Dalton soient du genre plutôt coincé et les Field tout le contraire, le courant passe entre eux. De retour en Angleterre, les Field proposent aux Dalton de venir passer un week-end dans leur propriété campagnarde. Ces derniers acceptent. Mais ce séjour qui s’annonçait idyllique va petit à petit se transformer en cauchemar.
Qualifié de film d’horreur, « Speak No Evil » est avant tout d’un long-métrage au suspense haletant avec seulement deux brèves scènes un brin sanguinolente. A condition de mettre de côté les quelques invraisemblances d’un scénario au demeurant bien construit, « Speak No Evil » ravira le public qui aime ces films dans lequel une atmosphère de plus en plus irrespirable s’installe au fur et à mesure que l’action avance. A ce titre, les trente dernières minutes, tout en évitant l’exagération souvent inhérente à ce genre de film, sont d’une folle intensité avec de multiples rebondissements qui vous clouent sur votre siège.
4 étoiles. « Le Comte de Monte-Cristo ». Marseille. 1815. Victime d’un complot dont la jalousie est le moteur, Edmond Dantès, 22 ans, est arrêté le jour de son mariage. Il est détenu dans d’horribles conditions au château d’If. Pendant son incarcération, il fait la connaissance de l’abbé Faria qui va lui révéler un secret qui lui permettra de devenir immensément riche après son évasion 14 ans plus tard. Sous l’identité du Comte de Monte-Cristo, il va alors patiemment élaborer un plan pour se venger des trois hommes qui l’ont trahi.
Cette nouvelle adaptation du célèbre roman d’Alexandre Dumas ne lésine pas sur les moyens puisque le budget se monte à 43 millions d’euros. Et ça se voit : les décors, la plupart naturels, les costumes, le maquillage et la photographie sont un régal pour l’œil. Quant à la distribution, elle est excellente. Pierre Niney, particulièrement convaincant quand il endosse le rôle du Comte de Monte-Cristo, est entouré d’acteurs et d’actrices qui n’ont rien à lui envier. Quant au film en lui-même, on peut lui reprocher un manque d’émotions tant la machine est bien huilée. Mais pas de quoi bouter son plaisir. En effet, le long-métrage, c’est le cas de le dire mais les trois heures passent très vite grâce à de multiples rebondissements, met fort bien en valeur le génie romanesque d’Alexandre Dumas.
4 étoiles. « Pas de vagues ». Julien est professeur de français dans un collège de banlieue. Jeune et dynamique, il a une approche pédagogique qui cherche à créer du lien entre lui et ses élèves. Il n’hésite pas à en prendre quelques-uns sous son aile, ce qui occasionne des jalousies : Julien est accusé de harcèlement par une élève et menacé de mort par le frère de cette dernière. Pris dans un engrenage infernal, qui va également avoir comme conséquence de révéler son homosexualité, et devant faire face à une direction qui veut éviter de faire des vagues, Julien pourra-t-il se sortir de cette situation ?
Inspiré d’un épisode que le réalisateur Teddy Lussi-Modeste a lui-même connu quand il était enseignant, « Pas de vagues » est un film sous haute tension qui décrit avec précision une mécanique qui s’emballe sans que rien ne semble pouvoir l’arrêter, à commencer par une administration bien peu soutenante. Porté par un François Civil qui exprime à merveille toutes les émotions vécues par son personnage et de jeunes actrices et acteurs formidables, « Pas de vagues », grâce également à une mise en scène très réaliste, sonne juste du début à la fin avec une ultime scène d’une folle intensité.
3 étoiles. « Les Barbares ». Dans le village breton de Paimpont, l’harmonie règne, en tout cas en apparence. Dans un grand élan de solidarité, le Conseil municipal, avec toutefois le vote peu enthousiaste du plombier, décide d’accueillir des Ukrainiens. Sauf qu’à la dernière minute débarque une famille syrienne, ce qui ne va pas, et de loin, plaire à tout le monde. Le beau vernis de l’unanimité va dès lors irrémédiablement se craqueler et faire éclater des vérités jusque-là bien enfouies.
Avec « Les Barbares », Julie Delpy, devant et derrière la caméra, met en avant la manière dont les réfugiés sont reçus de manière très différente en Europe. Elle le fait sous la forme d’une comédie grinçante qui privilégie le rire aux larmes en se jouant des clichés et de certains ses personnages tristement drôles. Et ça fonctionne plutôt bien grâce principalement à une excellente distribution. On n’en dira pas autant du scénario qui, à quelques exceptions près, ne brille guère par son originalité. Mais qu’à cela ne tienne, le film emporte globalement l’adhésion car tout en dénonçant un racisme ordinaire, il fait la part belle aux bons sentiments. Et même si c’est peu réaliste, ça fait du bien.
3 étoiles. « Le Fil ». Depuis qu’il a fait innocenter un assassin récidiviste quinze ans auparavant, Maître Jean Monier ne défend plus des personnes accusées de meurtre. Pourtant, sa rencontre avec Nicolas Milik, père de famille soupçonné d’avoir tué sa femme, va lui faire changer d’avis. Convaincu de l’innocence de son client, il reprend le chemin des assises et est prêt à tout pour qu’au terme du procès Nicolas Milik soit libéré.
Film de procès par excellence inspiré de faits réels, le film de et avec Daniel Auteuil vaut tout d’abord le détour pour la prestation de ses deux comédiens principaux, et tout particulièrement celle de Gregory Gadebois qui joue tout en retenue le rôle du présumé meurtrier. Leur performance ne suffit cependant pas toujours à faire oublier une certaine lenteur qui se dégage d’un film tourné à l’ancienne. On l’aurait souhaité plus tendu, à l’image de l’excellent « Le procès Goldman » de Cédric Kahn projeté sur les écrans l’année dernière. Malgré cette critique, « Le Fil » ne manque toutefois pas d’intérêt car il questionne l’intime conviction de l’avocat et la manière de la renforcer. Quitte à se tromper ?
3 étoiles. « Radical ». Les écoliers de la 6ème classe de l’école primaire Jose Urbina Lopez à Matamoros, où la misère et la violence sont bien présentes, font partie des élèves les moins performants du Mexique. L’enseignement qui leur est donné ne les implique absolument pas jusqu’au jour où débarque un nouvel enseignant, Sergio Juarez. Ce dernier décide de tenter une approche différente dans laquelle l’élève est acteur de ses apprentissages. Mais la méthode non conventionnelle de Sergio va susciter bien des interrogations de la part des autorités scolaires qui lui reprochent de ne pas suivre le programme.
Basé sur des faits réels, « Radical » séduit par son thème qui met au centre le principe de l’éducabilité de tous les enfants à partir du moment qu’il leur est fait confiance et que les séquences d’apprentissage les impliquent. La première partie du film est à ce titre très parlante et l’osmose entre les élèves et leur enseignant crève l’écran. Elle est la plus réussie. La seconde a tendance à tourner un peu en rond, et donc à s’étirer en longueur, et à tirer excessivement sur la corde sensible. Mais heureusement l’issue finale, malgré sa prévisibilité, est à la hauteur du postulat de départ du film et est émouvante.
3 étoiles. « Un p’tit truc en plus ». Pour échapper à la police suite à un casse dans une bijouterie, un père et son fils trouvent refuge, bien malgré eux, dans une colonie de vacances pour jeunes en situation de handicap au milieu de nulle part. Le plus jeune se fait passer pour un pensionnaire et le plus âgé pour son éducateur spécialisé ce qui va inévitablement créer des quiproquos pour le pire, mais surtout pour le meilleur.
Le premier film du comique Artus, succès « surprise » avec deux millions d’entrées en France en moins de deux semaines d’exploitation, est une comédie, malgré son scénario (très) prévisible et un langage grossier trop répétitif, où l’on rit de bon cœur et qui sait également émouvoir grâce principalement à son excellente distribution. Les actrices et acteurs en situation de handicap sont, en effet, d’un naturel extrêmement touchant. Et il en est de même pour Artus qui a trouvé dans son interprétation et sa réalisation le juste équilibre pour éviter les écueils d’un sujet sensible.
3 étoiles. « Il reste encore demain ». Rome, 1946. Delia est mère de trois enfants et mariée à Ivano, mari autoritaire et violent. En plus de s’occuper du foyer, dans lequel vit également son beau-père grabataire et désagréable, elle multiplie les petits boulots pour améliorer le revenu familial très modeste. Malgré ce contexte pesant, Delia fait contre mauvaise fortune bon cœur jusqu’au jour où elle prend conscience que sa fille qui s’apprête à célébrer ses fiançailles pourrait bien connaître le même sort qu’elle.
« Il reste encore demain » surprend dès sa première scène, toutefois peu crédible, qui glace le sang et donne le ton au film qui se situe entre la tragédie et la comédie. Dans la première partie, l’équilibre entre gravité et humour n’est pas toujours réussi, à l’image des scènes chorégraphiées de la violence conjugale qui laissent songeur. Dans la seconde partie, par contre, le film prend une autre dimension. Son interprète principale, Paola Cortellesi, lumineuse et également derrière la caméra, va prendre les choses en main pour lutter contre ce patriarcat étouffant. C’est fait de manière subtile grâce à un scénario qui réserve de belles surprises et une fin aussi inattendue que spectaculaire.
2 étoiles. « Emilia Perez ». Rita est une avocate douée. Elle travaille au service d’un cabinet qui non seulement ne reconnaît pas ses qualités, mais qui en plus défend des criminels plutôt que de servir la justice. Mais un jour, le chef d’un dangereux cartel fait appel à elle afin qu’elle l’aide à se retirer des affaires et à disparaître afin qu’il puisse réaliser le rêve qu’il caresse depuis des années : devenir une femme.
Prix du jury au Festival de Cannes 2024, Prix d’interprétation féminine remis aux quatre comédiennes principales du film et encensé par une large partie de la critique, « Emilia Perez » est un film déroutant aussi bien du point de vue de sa forme que de son fond. En effet, l’histoire est régulièrement entrecoupée de scènes de comédie musicale clinquantes et plus ou moins réussies (si les chorégraphies sont globalement splendides, certaines voix laissent à désirer) qui accentuent le côté bien peu réaliste du scénario. On a vraiment peine à croire que ce très méchant chef de cartel devienne tout à coup suite à sa transition un ange, ou presque. Pour apprécier le film, au demeurant d’une grande maîtrise technique et fort bien joué, mieux vaut donc croire aux contes de fées qui ne finissent toutefois pas forcément bien.
5 étoiles : à voir absolument, 4 étoiles : chaudement recommandé, 3 étoiles : ça vaut la peine, 2 étoiles : pas indispensable, 1 étoile : il y a mieux à faire, 0 étoile : à éviter